Evaluation/formation Numératie au cycle 3

Des évaluations standardisées à une formation entre pairs…

Un dispositif s’appuyant sur une expérimentation académique

En 2012, une évaluation académique sur la compréhension des écrits dans les disciplines a été proposée aux collèges volontaires. Reconduite chaque année, elle a touché plus du tiers des collèges de l’académie, soit plus de 5000 élèves. Cette évaluation s’est inspirée d’un travail mené dans l’académie de Créteil. Le CARDIE et la DPPM de l’académie de Caen ont accompagné les équipes dans leur démarche diagnostique au cycle 3.
Les pilotes de l’éducation prioritaire étaient demandeurs de la mise en place d’une évaluation complémentaire sur la numératie.
Note sur l’évaluation Littératie 6e

Des évaluations externes qui interrogent

Les résultats TIMSS "grade 4" de 2015 ont créé un véritable choc. En mathématiques, 87% des élèves français atteignent au moins le niveau « bas » (95% en Europe) et 21% le niveau « élevé » (39% en Europe), ce qui est le plus mauvais résultat des pays de l’Union européenne, sur des questions très proches des programmes scolaires ce qui confirmait les résultats produits par les évaluations Cedre de la DEPP. Cette même enquête TIMSS a montré, au travers de questionnaires, le manque d’aisance des professeurs des écoles français pour enseigner les mathématiques.

Les évaluations de la DEPP sur la compétence 3 en début de 6e (novembre 2015), situait Caen (comme Rouen) avec 245 contre une performance moyenne de 250 juste au-dessus de Créteil, Lille, Amiens et la Corse.

Conception d’une évaluation académique

En 2016, un groupe de travail inter degrés (IEN 1er degré mission maths, CPC maths, IA-IPR, formateurs 2d degré, IGEN) a conçu une évaluation diagnostique sur la « compréhension du nombre et mobilisation des opérations dans la résolution de problèmes ». Soutenu par le CARDIE et la DPPM et articulée à une formation, elle vise une montée en compétences de tous les élèves de cycle 3. Après une année d’expérimentation et de test des items, l’évaluation a concerné 56 collèges pour 4555 élèves de 6e en octobre 2017, 168 écoles pour 3558 élèves de CM2 en mars 2018 et 31 collèges pour 2622 élèves de 6e en septembre 2018.

Ressources


Pour concevoir cette évaluation, le groupe s’est appuyé sur l’expérimentation P.A.C.E.M. (Projet pour l’Acquisition de Compétences par les Élèves en Mathématiques) mené par Jean-François Chesné dans les académies de Créteil et de Marseille. Sa thèse "D’une évaluation à l’autre : des acquis des élèves sur les nombres en sixième à l’élaboration et à l’analyse d’une formation d’enseignants centrée sur le calcul mental" a pour objectif de décrire et d’analyser l’ensemble du dispositif.

Le groupe s’est appuyé sur les conférences et la synthèse de la conférence de consensus "Nombres et opérations : premiers apprentissages à l’école primaire", organisée en novembre 2015 par le Cnesco et l’Institut français de l’Éducation (Ifé). Les conférences ont été aussi des outils plébiscités par les enseignants, notamment celle de Laetitia DESMET de l’Université catholique de Louvain sur la compréhension de la notion de nombre, des nombres rationnels et celle d’Éric RODITI, de l’Université Paris Descartes sur le calcul et l’intelligence du calcul.

Enfin, le travail mené par le gouvernement de l’Ontario qui a développé depuis 2004, une stratégie de littératie et de numératie donne lieu à de nombreuses ressources expérimentées. Le document d’appui sur l’importance de l’enseignement des mathématiques "Mettre l’accent sur les fractions" a été une ressource très appréciée.

Exemples d’items et restitution

Les exercices proposés sont similaires aux items des évaluations généralisées. A partir d’un livret du professeur, les productions d’élèves sont évaluées par un codage. Le recueil des données par les services statistiques de la DPPM donne lieu à une restitution individuelle des élèves qui le positionne par rapport à sa classe, son établissement et l’académie.

La partie 2 du livret du professeur propose une exploitation pédagogique et d’autres exercices.

Mieux comprendre la construction des items et les mesures psychométriques

Les premiers échanges avec les enseignants ont montré la nécessité d’une acculturation à la méthodologie employée dans les programmes d’évaluations standardisées. Il est en effet important de mieux comprendre comment les évaluations standardisées sont construites et ce qu’apportent les données recueillies lors des cobayages et des évaluations à grande échelle. Cette acculturation s’est appuyée sur deux documents de la DEPP :
- l’article de Thierry Rocher « Mesure des compétences - Méthodes psychométriques utilisées dans le cadre des évaluations des élèves » paru dans les n°86-87 d’Education & Formation de mai 2015.
- le dossier de la DEPP 208 « Cedre 2014, mathématiques en fin d’école »

L’article de Thierry Rocher explique simplement comment observer les manifestations d’une variable latente, non observable directement et apporte des éléments de réponse à deux questions récurrentes :
- Est-ce qu’avec une autre liste d’items, on aurait les mêmes résultats ?
- Est-ce qu’il discrimine bien les personnes selon la dimension qu’il est censé mesurer ?

Le dossier de la DEPP aide à partir d’exemples à mieux comprendre la construction de l’échelle qui positionne les paramètres de difficulté des items et les niveaux de compétences des élèves.

Formation

Les modalités habituelles (conférences, ateliers, échanges de pratiques…) sont interrogées sur leur efficience, ce qui a conduit à déployer la formation entre pairs en lien avec la recherche.
Ces temps de formation en stage interdegrés, au sein du conseil Ecole Collège ou à l’initiative d’enseignants, ont généralement intégré cinq éléments importants :
- un diagnostic objectivé par l’évaluation académique
- un consensus des enseignants sur les enjeux
- le partage de ressources, d’expériences, d’outils
- la définition d’une stratégie commune
- un compte-rendu rédigé permettant de partager la stratégie commune
La dynamique engendrée par cette modalité de formation contribue à améliorer les qualités créatives et innovantes des enseignants.

Sur un réseau d’écoles attachées au même collège, le constat mettait en avant la qualité du travail des enseignants sur la compétence "raisonner". Les élèves du réseau réussissaient bien les items où on leur demandait de justifier leurs affirmations ou de rechercher la validité des informations dont ils disposent. Le travail mené sur le réseau autour des consignes n’y est pas étranger.

En revanche, la comparaison des nombres décimaux a mis en difficulté les élèves du collège, ce qui s’est traduit par un taux de réussite inférieur à celui de l’académie.
L’enjeu a été de définir une stratégie d’enseignement pour améliorer les compétences des élèves sur cette question dans le réseau.

En lien avec le travail de la chercheuse Laëtitia Desmet qui précisait que "l’accommodation aux nombres rationnels serait moins laborieuse si l’apprentissage des nombres naturels permettait d’anticiper l’enseignement des nombres rationnels",
une stratégie d’anticipation a été définie :

Au cycle 2 et au cycle 3, interroger régulièrement les élèves sur la position des chiffres dans l’écriture décimale d’un nombre : "dans l’écriture du nombre 24, quel chiffre a la plus grande valeur, 2 ou 4 ?"

Pour assurer une cohérence sur la manipulation au cycle 3, un échange sur les outils pédagogiques utilisés a conduit à proposer un choix commun de deux outils. Une seconde stratégie a été définie :

Varier les représentations et les types d’exercices

La progression des apprentissages a été interrogée en s’appuyant sur le document ressources Eduscol "Fractions et nombres décimaux au cycle 3". Une troisième stratégie a été définie :

commencer dès le début de l’année de CM1, sans attendre décembre ou janvier

Articulation aux évaluations nationales

Alors que l’évaluation académique était lancée, le ministère de l’Education Nationale a déployé une évaluation nationale en 6e. Très vite, s’est posée la question de l’articulation entre les deux évaluations.

La première année, les équipes ont souhaité garder l’évaluation académique plus rassurante. Le cœur du dispositif est le même : l’action collective et le développement professionnel pour une montée en compétences de tous les élèves en numératie. L’évaluation nationale est un outil plus évolué, qui s’appuie sur l’expertise de la DEPP, avec des items robustes basés sur des données à grande échelle et qui permet de discriminer avec des niveaux de maîtrise.

En complément, le dispositif académique apporte :
- une banque de données pour une évaluation complémentaire et une exploitation des traces écrites des élèves, notamment pour un travail sur l’erreur
- une montée en compétence des formateurs et des équipes en interdegrés

Partager

Imprimer cette page (impression du contenu de la page)